Le psoriasis est une dermatose inflammatoire chronique fréquente, affectant environ 2 à 3 % de la population mondiale․ Caractérisée par des plaques érythémato-squameuses bien définies, elle peut impacter significativement la qualité de vie des patients․ Son diagnostic est généralement clinique, mais certaines affections cutanées peuvent mimer son aspect, rendant le diagnostic différentiel crucial․ Cet article explore les principales maladies à considérer dans le diagnostic différentiel du psoriasis, en mettant l'accent sur les caractéristiques cliniques et les examens complémentaires permettant de les distinguer․

I․ Psoriasis : Aperçu Général

Avant d'aborder les maladies mimant le psoriasis, il est essentiel de rappeler les caractéristiques clés de cette affection․ Le psoriasis se manifeste typiquement par des plaques rouges, surélevées et recouvertes de squames blanchâtres ou argentées․ Ces plaques se localisent préférentiellement sur les coudes, les genoux, le cuir chevelu et la région lombaire․ Plusieurs formes cliniques existent, notamment le psoriasis en plaques (le plus fréquent), le psoriasis en gouttes, le psoriasis inversé (affectant les plis cutanés), le psoriasis pustuleux et le psoriasis érythrodermique․

Le psoriasis est une maladie multifactorielle impliquant une prédisposition génétique et des facteurs environnementaux․ Le rôle du système immunitaire est primordial, avec une activation anormale des lymphocytes T, conduisant à une inflammation chronique et à une hyperprolifération des kératinocytes (les cellules de l'épiderme)․ Certains gènes, notamment ceux du complexe majeur d'histocompatibilité (HLA), sont associés à un risque accru de développer un psoriasis;

II․ Maladies Érythémato-Squameuses à Distinguer du Psoriasis

Plusieurs dermatoses peuvent présenter des similitudes cliniques avec le psoriasis, nécessitant une évaluation attentive pour un diagnostic précis․ Nous examinerons les plus fréquentes et les plus importantes à différencier․

A․ Eczéma

L'eczéma, également appelé dermatite, est un terme générique désignant un groupe d'affections inflammatoires de la peau․ Plusieurs types d'eczéma existent, dont l'eczéma atopique (le plus fréquent), l'eczéma de contact (allergique ou irritatif), l'eczéma nummulaire et la dyshidrose․

1․ Eczéma Atopique

L'eczéma atopique est une maladie inflammatoire chronique de la peau, caractérisée par des démangeaisons intenses, une peau sèche et des lésions eczémateuses․ Il débute généralement dans l'enfance et peut persister à l'âge adulte․ Les lésions se localisent préférentiellement sur les plis des coudes et des genoux, le visage et le cou chez les nourrissons, et les mains et les pieds chez les adultes․

Différences avec le psoriasis :

  • Âge de début : L'eczéma atopique débute souvent dans l'enfance, tandis que le psoriasis peut survenir à tout âge․
  • Localisation des lésions : L'eczéma atopique affecte fréquemment les plis cutanés, tandis que le psoriasis se localise plus souvent sur les surfaces d'extension (coudes, genoux)․
  • Démangeaisons : Les démangeaisons sont généralement plus intenses dans l'eczéma atopique que dans le psoriasis․
  • Aspect des lésions : Les lésions d'eczéma atopique sont souvent moins bien définies et plus suintantes que les plaques de psoriasis․
  • Antécédents personnels et familiaux : Les patients atteints d'eczéma atopique ont souvent des antécédents personnels ou familiaux d'atopie (eczéma, asthme, rhinite allergique)․

2․ Eczéma de Contact

L'eczéma de contact est une réaction inflammatoire de la peau causée par un contact direct avec une substance irritante (eczéma de contact irritatif) ou un allergène (eczéma de contact allergique)․ Les lésions se localisent à l'endroit du contact avec la substance responsable․

Différences avec le psoriasis :

  • Histoire : L'eczéma de contact est déclenché par un contact avec une substance spécifique, tandis que le psoriasis est une maladie chronique sans cause externe évidente․
  • Localisation des lésions : L'eczéma de contact se limite à la zone de contact avec la substance, tandis que le psoriasis peut affecter diverses parties du corps․
  • Tests allergologiques : Des tests allergologiques (patch tests) peuvent aider à identifier l'allergène responsable de l'eczéma de contact allergique․

B․ Pityriasis Rosé de Gibert

Le pityriasis rosé de Gibert est une éruption cutanée fréquente, caractérisée par l'apparition d'une lésion initiale unique, appelée "plaque mère", suivie quelques jours ou semaines plus tard par une éruption généralisée de petites lésions ovales, disposées selon les lignes de clivage de la peau (aspect en "sapin de Noël")․ L'étiologie est inconnue, mais une origine virale est suspectée․

Différences avec le psoriasis :

  • Évolution : Le pityriasis rosé de Gibert a une évolution spontanément résolutive en quelques semaines ou mois, tandis que le psoriasis est une maladie chronique․
  • Aspect des lésions : Les lésions du pityriasis rosé de Gibert sont généralement plus petites et moins épaisses que les plaques de psoriasis․ La plaque mère est caractéristique․
  • Distribution des lésions : La disposition en "sapin de Noël" des lésions est typique du pityriasis rosé de Gibert․
  • Prurit : Le prurit est généralement moins intense dans le pityriasis rosé de Gibert que dans le psoriasis․

C․ Pityriasis Rubra Pilaire

Le pityriasis rubra pilaire (PRP) est une dermatose rare, caractérisée par une érythrodermie (rougeur généralisée de la peau) avec des squames, une kératose folliculaire (petites papules rugueuses autour des follicules pileux) et une kératodermie palmo-plantaire (épaississement de la peau des paumes et des plantes)․ Il existe plusieurs formes de PRP, dont les formes classiques de l'adulte et de l'enfant, et les formes atypiques․

Différences avec le psoriasis :

  • Érythrodermie : Le PRP se manifeste souvent par une érythrodermie, qui est rare dans le psoriasis (sauf dans le psoriasis érythrodermique)․
  • Kératose folliculaire : La kératose folliculaire est une caractéristique importante du PRP, absente dans le psoriasis․
  • Kératodermie palmo-plantaire : La kératodermie palmo-plantaire est fréquente dans le PRP, mais moins fréquente dans le psoriasis․
  • Îlots d'épargne : Le PRP peut présenter des zones de peau normale (îlots d'épargne), ce qui est rare dans le psoriasis érythrodermique․

D․ Lichen Plan

Le lichen plan est une dermatose inflammatoire chronique, caractérisée par des papules planes, polygonales, violacées et prurigineuses․ Il peut affecter la peau, les muqueuses (bouche, organes génitaux) et les ongles․ L'étiologie est inconnue, mais une réaction auto-immune est suspectée․

Différences avec le psoriasis :

  • Aspect des lésions : Les lésions du lichen plan sont des papules planes, polygonales et violacées, tandis que les lésions du psoriasis sont des plaques érythémato-squameuses․
  • Prurit : Le prurit est généralement plus intense dans le lichen plan que dans le psoriasis․
  • Atteinte muqueuse : Le lichen plan affecte fréquemment les muqueuses, ce qui est rare dans le psoriasis (sauf le psoriasis inversé)․
  • Signe de Koebner : Le signe de Koebner (apparition de lésions sur les sites de traumatisme cutané) est fréquent dans le lichen plan et le psoriasis․

E․ Mycosis Fongoïde (Lymphome Cutané T Cellulaire)

Le mycosis fongoïde est un lymphome cutané T cellulaire (LCTC), une forme rare de cancer affectant les lymphocytes T de la peau․ Il se manifeste initialement par des plaques eczémateuses ou psoriasiformes, qui peuvent évoluer vers des tumeurs et des ulcérations․ Le diagnostic est souvent difficile et peut nécessiter plusieurs biopsies cutanées․

Différences avec le psoriasis :

  • Évolution : Le mycosis fongoïde a une évolution chronique et progressive, tandis que le psoriasis est une maladie chronique mais généralement stable․
  • Résistance aux traitements : Les lésions de mycosis fongoïde peuvent être résistantes aux traitements conventionnels du psoriasis․
  • Biopsie cutanée : La biopsie cutanée est essentielle pour le diagnostic de mycosis fongoïde, montrant une infiltration de lymphocytes T atypiques dans la peau․
  • Adénopathies : Des adénopathies (ganglions lymphatiques enflés) peuvent être présentes dans le mycosis fongoïde․

F․ Dermatophyties (Infections Fongiques de la Peau)

Les dermatophyties sont des infections fongiques de la peau, causées par des champignons appelés dermatophytes․ Elles peuvent affecter différentes parties du corps, notamment les pieds (pied d'athlète), les ongles (onychomycose), le cuir chevelu (teigne) et le corps (tinea corporis)․ Les lésions sont généralement rouges, squameuses et prurigineuses․

Différences avec le psoriasis :

  • Aspect des lésions : Les lésions de dermatophytie sont souvent annulaires (en forme d'anneau) avec un bord surélevé et une zone centrale plus claire․
  • Examen mycologique : L'examen mycologique (prélèvement et culture des squames) permet d'identifier le champignon responsable de l'infection․
  • Réponse aux antifongiques : Les dermatophyties répondent généralement bien aux traitements antifongiques․

G․ Syphilis Secondaire

La syphilis secondaire est la deuxième phase de la syphilis, une infection sexuellement transmissible causée par la bactérie *Treponema pallidum*․ Elle se manifeste par une éruption cutanée généralisée, souvent maculo-papuleuse ou psoriasiforme, affectant notamment les paumes et les plantes․ D'autres symptômes peuvent être présents, tels que des lésions muqueuses, des adénopathies et une fièvre․

Différences avec le psoriasis :

  • Atteinte palmo-plantaire : L'atteinte des paumes et des plantes est fréquente dans la syphilis secondaire, mais rare dans le psoriasis (sauf le psoriasis pustuleux palmo-plantaire)․
  • Lésions muqueuses : Les lésions muqueuses (ulcérations, plaques blanchâtres) sont fréquentes dans la syphilis secondaire․
  • Adénopathies : Des adénopathies sont souvent présentes dans la syphilis secondaire․
  • Tests sérologiques : Les tests sérologiques (VDRL, TPHA) permettent de confirmer le diagnostic de syphilis․

H․ Réactions Médicamenteuses (Toxidermies)

Certains médicaments peuvent provoquer des réactions cutanées ressemblant au psoriasis (toxidermies psoriasiformes)․ Les médicaments les plus souvent impliqués sont les bêta-bloquants, les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC), le lithium et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)․ L'arrêt du médicament responsable entraîne généralement la résolution de l'éruption․

Différences avec le psoriasis :

  • Histoire : La survenue de l'éruption est liée à la prise d'un médicament spécifique․
  • Évolution : L'éruption s'améliore ou disparaît après l'arrêt du médicament responsable․
  • Aspect des lésions : Les lésions peuvent être variables, mais souvent plus diffuses et moins bien définies que les plaques de psoriasis․

III․ Examens Complémentaires Utiles au Diagnostic Différentiel

En plus de l'examen clinique, certains examens complémentaires peuvent être utiles pour différencier le psoriasis des autres maladies érythémato-squameuses․

  • Biopsie cutanée : La biopsie cutanée est un examen clé pour confirmer le diagnostic de psoriasis et éliminer d'autres affections, telles que le mycosis fongoïde ou le lichen plan․ Elle consiste à prélever un petit échantillon de peau pour l'examiner au microscope․
  • Examen mycologique : L'examen mycologique (prélèvement et culture des squames) permet de diagnostiquer les dermatophyties;
  • Tests allergologiques (patch tests) : Les patch tests sont utilisés pour identifier les allergènes responsables de l'eczéma de contact allergique․
  • Tests sérologiques : Les tests sérologiques (VDRL, TPHA) permettent de diagnostiquer la syphilis․
  • Dosage des IgE sériques : Un taux élevé d'IgE sériques peut être observé dans l'eczéma atopique․

IV․ Conclusion

Le diagnostic différentiel du psoriasis peut être complexe, en raison du grand nombre de maladies cutanées qui peuvent mimer son aspect․ Une anamnèse détaillée, un examen clinique attentif et, si nécessaire, des examens complémentaires sont essentiels pour établir un diagnostic précis et proposer une prise en charge adaptée․ Il est important de considérer l'âge du patient, la localisation et l'aspect des lésions, les antécédents personnels et familiaux, ainsi que l'évolution de l'éruption․ En cas de doute, une biopsie cutanée peut être réalisée pour confirmer le diagnostic․

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